Candace Bahouth, l’art à tout casser

Ayant vu ses œuvres hautement baroques, colorées et joyeuses nous sommes obligées d’avouer que nous nous étions fait une idée assez précise de la personnalité de Candace. Née aux États-Unis et diplômée des beaux-arts de Syracuse, elle a finalement fait de l’Angleterre sa terre d’adoption, et notamment ce comté du Somerset, où elle a débusqué son rêve d’atelier.

Avant d’être l’atelier de Candace Il y a bien longtemps cet endroit était une chapelle. Étonnant me direz-vous ? Pas tant que ça quand on le met en regard des créations tout sauf banales de l’artiste. En effet qu’il s’agisse de tapisseries, de mosaïques ou de miroirs géants, ces créations témoignent toutes à leur manière de l’audace, l’énergie et la fantaisie débridée qui l’animent. Elles pourraient d’ailleurs être des métaphores de son approche de la vie : vibrante, intime et pleine de surprises.

Candace n’a pas suivi un parcours conventionnel. Après avoir vécu à New York, où elle a commencé ses tapisseries à l’aiguille, elle s’est installée en Angleterre pour garder les enfants, les chiens et les chevaux d’un petit village. Cette plongée dans la campagne, loin du tumulte urbain, va nourrir son art et lui apporter une touche de simplicité et de spontanéité. C’est là, dans la nature, qu’elle trouve la matière nécessaire à son travail, en passant d’une technique à l’autre et en explorant sans cesse de nouvelles formes d’expression créative.

Diplômée des Beaux-Arts, elle a rapidement tracé son chemin, avec des expositions remarquées, comme celle du Musée américain de Bath en 1996, qui battra des records de fréquentation, ou encore ses expositions conjointes avec Kaffe Fassett, qui attireront également un public enthousiaste. Si elle est surtout reconnue pour ses tapisseries – dans des styles allant du médiéval à Gustav Klimt, des compositions florales aux portraits – elle ne se limite pas à ce médium.

Au fil des années en effet, elle a intégré des éléments de mosaïques à son œuvre dans une volonté de redonner une deuxième vie aux objets du quotidien. La mosaïque n’est pas une discipline que l’on associe toujours aux artistes contemporains, mais elle a su en faire une signature personnelle. Sa technique allie la tradition de la mosaïque classique aux influences modernes, créant des œuvres vibrantes et colorées. Ses mosaïques sont souvent constituées de fragments de matériaux divers : carreaux de céramique, verre, pierres semi-précieuses, mais aussi des objets récupérés qu’elle réintègre dans ses compositions. Ses mosaïques ont une qualité tactile et immersive, invitant le spectateur à s’en approcher pour apprécier la richesse de chaque détail. Cette approche fait d’elle une pionnière dans l’art de la mosaïque contemporaine.

« je crée  des objets de beauté et de fantaisie à partir de choses banales»

À cet égard l’une de ses créations emblématiques reste ses miroirs rois et reines. Commandée par la manufacture de céramique Moorcroft, cette série a été un tournant dans son parcours artistique. Elle a en effet inséré des images de rois et de reines, mais toujours avec une touche décalée comme cet ajout d’Elvis, un clin d’œil à son amour pour la culture populaire qu’elle revendique. Pour Candace, l’art doit rester en mouvement et est avant tout un moyen de transformer les objets banals en sources de beauté et d’émerveillement, «je crée  des objets de beauté et de fantaisie à partir de choses banales.» C’est peut-être cet aspect-là qui est au cœur de son travail : rendre visible la magie du quotidien.

Son esprit, de son propre aveu est rempli d’idées et de projets sans fin, mais elle refuse de les enfermer dans des deadlines ou des plannings trop contraignants. Elle préfère être présente dans l’instant, tout en cultivant de l’espoir pour l’avenir. Cet espoir se traduit par une énergie constante dans son travail et une philosophie optimiste, même si elle est réaliste sur les menaces qui pèsent sur la planète. Elle s’inquiète des déchets, des prisons, des guerres inutiles, mais reste convaincue de la résilience de la nature et des êtres humains.

C’est pour garder cette confiance mais aussi pour se recentrer et trouver la beauté, qu’elle consacre un jour de sa semaine à jardiner. Cette même beauté qu’elle ne cessera de retrouver dans ses œuvres en associant des objets que personne ne regarde, en travaillant avec des matériaux et des idées qui se croisent et se superposent, dans une quête d’harmonie et de sens. Candace est l’exemple même de la manière dont l’art peut transformer notre regard sur le monde : non pas en imposant une histoire préconçue, mais en ouvrant des fenêtres sur des réalités nouvelles, toutes empreintes de poésie et d’émerveillement.

 

CANDACE BAHOUTH

Artiste plasticienne 

Collection permanente Garden Café du Holburne Museum.

Holburne Museum. Great Pulteney Street, Bath.  Ouverture TLJ de 10h à 17h (dimanche et jours fériés de 11h à 17h). Fermé du 24 au 26 décembre et le 1er janvier.

 

Mots : Audrey Demarre

Photos:  Portrait Iani Kemp pour Country & Town House.  Autres photos Ingrid Bauer 

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