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Cyril Aouizerate, le maître à penser l’hospitalité

Nous sommes à Saint Ouen, le soleil pointe son nez, le maître à penser l’écologie sociale avance en Birkenstock, veste couleur kaki et bonnet. Au calme dans une des chambres du Mob House, à l’abri des regards et des pensées perdues, nous parlons écologie sociale.

Le trublion de l’hôtellerie

Se lever tôt le matin pour ne pas manquer d’étrangers qui viendraient à passer »

Avant de rencontrer ce fils de typographe du Sud-Ouest, on avait mené notre petite enquête sur Cyril Aouizerate. Des qualificatifs courent sur la toile, comme philosophe-entrepreneur, artisan-hôtelier, urbaniste etc. Et à la rédac, on a beaucoup ri quand il avait annoncé sa rédemption vestimentaire face aux financiers auxquels il accordait trop d’importance et se tenait à carreau à coup de costume choisi puis il a fait tomber la chemise pour laisser entrer sa vraie personnalité : nous y voilà, le trublion de l’hôtellerie mène son petit bout de chemin (en chaussons) depuis maintenant plus de 15 ans. Il privilégie la justice sociale et opte pour une hospitalité où la relation à autrui est très importante, renouant avec sa madeleine, sa jeunesse de militant anti-social. « J’ai vu disparaître une génération et filiation d’éleveurs au profit de lotisseurs ». Cyril opte pour la figure tutélaire d’Abraham dans la Bible et « se lever tôt le matin pour ne pas manquer d’étrangers qui viendraient à passer », devient son mantra ou philosophie de vie. 

L’hospitalité d’un nouveau genre

Dans le mot hospitalité, il y a le mot hôte qui veut dire accueillir et être accueilli »

A la lecture de nos notes et de son livre Penser l’hospitalité, on pourrait presque dire qu’un hôtel devrait être comme une église où toute âme perdue, voyageur sans frontière ou badaud devrait être accueilli sans jugement. Revenir un peu à l’époque des auberges, où on prend le temps d’accueillir l’autre.

« Dans le mot hospitalité, il y a le mot « hôte » qui veut dire accueillir et être accueilli. Une dualité. Il n’y a pas d’hospitalité s’il n’y a pas de porte. Les portes sont faites pour être ouverte et aussi pour être fermée. » L’histoire débute à Brooklyn en 2011, dans le quartier populaire de Boerum Hill, « pas là où les fils à papa ont leur loft à Williamsburg », où, avec son ami Alain Senderens, il crée le premier restaurant et centre culturel vegan, MOB, pour Maïmonide Of Brooklyn. En rencontrant les néo-paysans, il comprend « qu’une nouvelle matrice est en train de se mettre en route », et notamment avec l’apparition des fermes urbaines. Conscient que « le tourisme demeure un des vecteurs les plus importants du dérèglement climatique » et que « nous sommes responsables du vivant », l’artisan hôtelier assume ses contradictions d’être humain et se donne pour mission de réduire son impact le plus possible. À travers MOB, il revendique plus de collectif, d’inclusif et de social. Révolté contre le mépris des classes, la gentrification de certains qui militent gentiment à coup de pédales depuis le Marais, jusqu’au Canal Saint Martin, les bobos (pour ne pas les nommer) « quel acte de résistance! », ironise-t-il, Cyril s’inscrit dans le courant du penseur écologiste Murray Bookchin. Décédé en 2006, cet ancien militant américain d’origine russe est considéré comme l’une des figures majeures de l’éco-anarchisme du XXème siècle, ayant écrit plusieurs ouvrages évoquant le choix entre l’utopie anarchiste ou l’extinction de l’humanité.

L’écologie sociale

Je n’ai pas une vision contemporaine de la nature (…) la nature n’est pas la propriété de l’homme. »

« Je n’ai pas une vision contemporaine de la nature »; Attaché profondément au vivant, le philosophe entrepreneur, s’inscrit dans la tradition hassidique, « la nature n’est pas la propriété de l’homme ». Convaincu des vertus sacrées de la nature, de la forêt et de l’arbre qui est au cœur de ses croyances religieuses, ce végétarien avant l’heure, s’interroge sur « comment on fait peuple ». Se référant aux philosophes et leur approche autour du plan de table, il convoque dans ses hôtels le bon sens et le respect du vivant. Ces restaurants sont les seuls à être certifiés agrobiologiques. L’équipe du MOB ne source que des artisans made in France pour les nourritures terrestres, les shampooings ou savons, le mobilier ou les matières premières, comme l’Argilus, alternative à la peinture. Pour leur prochain hôtel à Bordeaux, le collectif travaille sur « la construction passive et l’indépendance énergétique » Le temps est comme la valse de Jacques Brel à mille temps et se conjugue aussi à plein temps; Chaque projet d’hôtel prend au moins 5 à 7 ans, pour sortir de terre ou éclore. Pour notre affranchi de l’écologie, les discours sur la fin du monde, sont anxiogènes et contre-productifs. « Mieux vaut s’adapter au monde qui nous attend et passer à l’action avec panache », sourit Cyril. « Je ne crois pas du tout en l’économie verte », ceci est un oxymore. « Plus un entrepreneur va aller dans l’altérité avec conscience, plus son impact sera plus ou moins négatif sur le vivant. » Nous serons sollicités intellectuellement sur notre adaptation aux crues, aux sécheresses, aux catastrophes naturelles; « Ce sera le défi de l’Homo sapiens » et ensemble nous sommes en train d’écrire ce nouveau monde, en pleine conscience, avec malgré tout regrette le résigné, « un appauvrissement de la complexité de la pensée. »

Mouvement de pionniers, engagé mais pas moraliste

Cyril Aouizerate. Artisan hôtelier

Mob House. Hotel-restaurant-centre culturel-piscine. 70 rue des Rosiers. 
93400 St Ouen

Chambre à partir de 149€/nuit

Mots : Ingrid Bauer
Photos: @alizeebauer

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Cyril Aouizerate, le maître à penser l’hospitalité

Nous sommes à Saint Ouen le soleil pointe son nez, le Maitre à penser de l’écologie sociale avance en Birkenstock, veste de couleur kaki et bonnet. Au calme dans une des chambres du Mob House, à l’abri des regards et des pensées perdues, nous parlons d’écologie sociale.

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Se lever tôt le matin pour ne pas manquer d’étrangers qui viendraient à passer »

Avant de rencontrer ce fils de typographe du Sud-Ouest, on avait mené notre petite enquête sur Cyril Aouizerate. Des qualificatifs courent sur la toile, comme philosophe-entrepreneur, artisan-hôtelier, urbaniste etc. A la rédac, on avait beaucoup ri quand il avait annoncé sa rédemption vestimentaire face aux financiers auxquels il accordait trop d’importance et se tenait à carreau à coup de costume choisi puis il a fait tomber la chemise pour laisser entrer sa vraie personnalité : nous y voilà, le trublion de l’hôtellerie mène son petit bout de chemin (en chaussons) depuis maintenant plus de 15 ans. Il privilégie la justice sociale et opte pour une hospitalité où la relation à autrui est très importante, renouant avec sa madeleine, sa jeunesse de militant anti-social. « J’ai vu disparaître une génération et filiation d’éleveurs au profit de lotisseurs ». Cyril opte pour la figure tutélaire d’Abraham dans la Bible et « se lever tôt le matin pour ne pas manquer d’étrangers qui viendraient à passer », devient son mantra ou philosophie de vie. 

Dans le mot hospitalité, il y a le mot hôte qui veut dire accueillir et être accueilli »

A la lecture de nos notes et de son livre Penser l’hospitalité, on pourrait presque dire qu’un hôtel devrait être comme une église où toute âme perdue, voyageur sans frontière ou badaud devrait être accueilli sans jugement. Revenir un peu à l’époque des auberges, où on prend le temps d’accueillir l’autre. « Dans le mot hospitalité, il y a le mot hôte qui veut dire accueillir et être accueilli. Une dualité. Il n’y a pas d’hospitalité s’il n’y a pas de porte. Les portes sont faites pour être ouverte et aussi pour être fermée. » L’histoire débute à Brooklyn en 2011, dans le quartier populaire de Boerum Hill, « pas là où les fils à papa ont leur loft à Williamsburg », où, avec son ami Alain Senderens, il crée le premier restaurant et centre culturel vegan, MOB, pour Maïmonide Of Brooklyn. En rencontrant les néo-paysans, il comprend « qu’une nouvelle matrice est en train de se mettre en route », et notamment avec l’apparition des fermes urbaines. Conscient que « le tourisme demeure un des vecteurs les plus importants du dérèglement climatique » et que « nous sommes responsables du vivant », l’artisan hôtelier assume ses contradictions d’être humain et se donne pour mission de réduire son impact le plus possible. A travers MOB, il revendique plus de collectif, d’inclusif et de social. Révolté contre le mépris des classes, la gentrification d’autres qui militent gentiment à coup de pédales depuis le Marais, jusqu’au Canal St Martin, les bobos (pour ne pas les nommer) « quel acte de résistance! », ironise-t-il, Cyril s’inscrit dans le courant du penseur écologiste Murray Bookchin. Décédé en 2006, cet ancien militant américain d’origine russe est considéré comme l’une des figures majeures de l’éco-anarchisme du XXe siècle, ayant écrit plusieurs ouvrages évoquant le choix entre l’utopie anarchiste ou l’extinction de l’humanité.

« Je n’ai pas une vision contemporaine de la nature (…) la nature n’est pas la propriété de l’homme. »

« Je n’ai pas une vision contemporaine de la nature »; Attaché profondément au vivant, le philosophe entrepreneur, s’inscrit dans la tradition hassidique, « la nature n’est pas la propriété de l’homme ». Convaincu des vertus sacrées de la nature, de la forêt et de l’arbre qui est au cœur de ses croyances religieuses, ce végétarien avant l’heure, s’interroge sur « comment on fait peuple ». Se référant aux philosophes et leur approche du plan de table, il convoque dans ses hôtels le bon sens et le respect du vivant. Ces restaurants sont les seuls à être certifiés agrobiologiques. L’équipe du MOB ne source que des artisans made in France pour les nourritures terrestres, les shampooings ou savons, le mobilier ou les matières premières, comme l’Argilus, alternative à la peinture. Pour leur prochain hôtel à Bordeaux, le collectif travaille sur « la construction passive et l’indépendance énergétique » Le temps est comme la valse de Jacques Brel à mille temps et se conjugue aussi à plein temps; Chaque projet d’hôtel prend au moins 5 à 7 ans, pour sortir de terre ou éclore. Pour notre affranchi de l’écologie, les discours sur la fin du monde, sont anxiogènes et contre-productifs. « Mieux vaut s’adapter au monde qui nous attend et passer à l’action avec panache », sourit Cyril. « Je ne crois pas du tout en l’économie verte », ceci est un oxymore. « Plus un entrepreneur va aller dans l’altérité avec conscience, plus son impact sera plus ou moins négatif sur le vivant. » Nous serons sollicités intellectuellement sur notre adaptation aux crues, aux sécheresses, aux catastrophes naturelles; « Ce sera le défi de l’Homo sapiens » et ensemble nous sommes en train d’écrire ce nouveau monde, en pleine conscience, avec malgré tout regrette le résigné, un appauvrissement de la complexité de la pensée.

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MOB. Mouvement de pionniers, engagé mais pas moraliste

Cyril Aouizerate. Artisan hôtelier

Mob House. Hotel-restaurant-centre culturel-piscine. 70 rue des Rosiers. 
93400 St Ouen

Chambre à partir de 149€/nuit

Mots : Ingrid BAUER
Photos: Alizée BAUER

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