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Piet Hein Eek et la neo-factory

Conversation avec le grand designer néerlandais Piet Hein Eek qui n’a pas attendu la fin du monde pour créer du mobilier à partir de matériaux recyclés.

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Piet Hein Ekke, le designer néerlandais est reconnu par ses pairs comme l'avant gardiste de l'up-cycling. En 2010, il installe son entreprise dans l'ancienne usine Philips de près de 10 000 M2, dans un quartier industriel d'Eindhoven. Puis au fil des années, le grand maître fait prospérer cette incroyable factory, apparaissent un boutique-hôtel avec 13 chambres, des bureaux, un restaurant, une galerie, un show-room, etc... la jeune rue à la sauce néerlandaise. Sa volonté? créer une expérience immersive à travers sa vision du monde et du design: des matières eco-responsables, des couleurs chatoyantes, une création unique, des antiquités chinées, des artistes choisis, etc... avec pour coeur battant, son atelier de fabrication. En avril dernier, quelle ne fut notre surprise quand en se rendant chez Merci, nous découvrons le Pop up store de Piet Hein Eek avec son protagoniste en personne, pour répondre à nos multiples questions…

Humeur du jour ?

Après la tempête du week-end, le calme, je suis au top ! 

Humeur de Demain ?

La joie ! Parallèlement aux projets avec mes clients, nous nous concentrons vers la reconstruction du restaurant dans la rue et ajoutons des studios à louer.

Les possibilités et les limites de notre environnement déterminent ce que je conçois

Votre processus de fabrication? Depuis combien de temps avez vous inventé ce procédé?

C’était dans les années 2000, j’étais ennuyé par le fait de jeter des matériaux nécessaire à la fabrication des produits et qui demandaient aussi beaucoup de travail de transformation. Nous avons donc commencé à ramasser sur des chantiers des planches de bardages des maisons de couleur néerlandaises, des chutes de parquets, etc… C’est ainsi que le concept des collections “0 Waste“ est né. La façon dont nous produisons est assez différente de ce qui est communément utilisé dans l’industrie du meuble. Chaque série est fabriquée à la commande et en petite quantité. Le matériau, la technique et l’artisanat sont le point de départ de chaque design. Les possibilités et les limites de notre environnement déterminent ce que je conçois; Je prends donc ce que le monde offre comme point de départ de mon processus créatif au lieu de faire de la créativité sans se soucier du monde qui nous entoure. Dans notre atelier, l’artisan est en charge de la fabrication complète du produit; Au sein d’un circuit traditionnel, les pièces sont usinées par une pléthore de machines avant d’être assemblées.

Quelles étaient vos intentions de départ ?

Il y a vingt ans, le coût de la main-d’œuvre était plus importante que les ressources achetées, l’approvisionnement en matières premières se raréfiait alors que la population mondiale augmentait de façon spectaculaire. J’ai donc pensé qu’il fallait inverser les choses et faire comme si les matériaux valaient une fortune et que la main-d’œuvre était gratuite. J’ai commencé à fabriquer des objets à partir de nos restes en utilisant autant que possible la main-d’œuvre comme une finalité en soi.

Une collection d’objets pour la vie et destinée à être transmise à de nombreuses générations.“

La particularité de votre mobilier est la résine. Son impact pour l’environnement?


Quand la première table a été terminée, elle était incroyablement rugueuse, alors j’ai demandé à un contremaître de la laquer une dizaine de fois. L’effet obtenu était détonnant : au lieu d’avoir une surface lisse et brillante, c’était comme si elle avait été émaillée à l’instar de la céramique. A cause de la laque, la main d’œuvre, le coût de la la table était extrêmement chère; Nous pensions que cet objet ne serait pas vendable. C’est le contraire qui s’est produit : la collection “0 Waste“ est devenue un succès, compte tenu des efforts et attention requise quant au process de fabrication. Le laquage est une partie très importante du design. C’est notre ADN. Au départ, nous commencé par travailler avec des laques de bateaux inspirées des mythiques Riva. Depuis, elles sont devenues plus sophistiquées et moins nocives pour l’environnement. La spécificité de nos meubles, un design pérenne: une collection de d’objets pour la vie et destinée à transmise à de nombreuses générations.

Avez-vous des enfants ? Quelle éducation leur donnez-vous, et ce notamment par rapport à l'urgence climatique ?

Oui, j’ai 3 filles. Mon ex-femme est plutôt consciente dans le quotidien de ne pas gâcher et de le faire prendre conscience auprès de nos enfants. Je suis plus philosophe et je pense que notre réflexion environnementale est très basée sur l’idée de consommer comme on l’a toujours fait. Maintenant il faudrait revoir notre mode de consommer et se poser la question “pourquoi consomme t-on? En a-t-on besoin, etc…“ Par exemple, si vous êtes en voiture pour une mauvaise raison, une voiture électrique reste stupide. Donc j’essaie d’apprécier ce qui est important dans la vie, c’est-à-dire pour moi c’est de ne pas consommer. Dans notre usine, nous essayons d’être aussi pragmatiques que possible en ce qui concerne les sources (matérielles et humaines), tant sur le plan environnemental qu’économique.

Prendre ce que le monde m’offre comme point de départ à ma créativité et non l’inverse

Quelles recommandations pour les jeunes designers ? Ou artisans ? Comment peut-on optimiser le recyclage dans la conception ?

Si nous fabriquions des objets pour la vie, nous ne recyclerions pas. Donc pour moi, célébrer le recyclage en tant que tel, ne devrait pas exister. Tout comme le concept du « cradle to cradle », c’est à dire créer pour recycler, a le même côté sombre. Le problème s’observe aussi dans l’architecture, où nous devrions penser à ce que nous ferons des matériaux lorsqu’ils seront détruits. Plutôt que de construire pour une génération, il faut réviser son mode de faire et de penser. Tout le monde sait que les coûts pour construire quelque chose qui sera détruit d’ici 50 ans au lieu de centaines d’années sont extrêmement élevés. Cradle to crade qui en soi n’est pas mauvais en soi mais devient un alibi pour construire de la mauvaise qualité et faire de la consommation d’architecture de forme ! Ma philosophie et processus de fabrication : prendre ce que le monde m’offre comme point de départ à ma créativité, et non l’inverse. Ainsi, la créativité devrait peut-être être moins considérée comme la création de quelque chose de nouveau et plus comme la création de qualité d’une manière décente.

Dernier mot ?

Prendre ce que le monde m’offre comme point de départ à ma créativité et non l’inverse

PIET HEIN EEK
Diplomé de l’Académie de Eindohven (1990) avec le projet «Scrap Wood Cupboard».

Visiter à Eindhoven la neo-factory de Piet Hein Eek et son hôtel , show room, galerie, restaurant, bar, etc… 

Piet Hein Eek

@piet_hein_eek

Mots : Ingrid Bauer
Photographies : Ingrid Bauer & Studio Piet Hein Eek

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