
Maïka Nuti, régénératrice d’une économie de liens à la Climate House
Climate House se veut un lieu hybride, entre catalyseur de transformation et laboratoire de coopération. Sa co-directrice générale, Maïka Nuti nous parle de son parcours, de ses convictions et de cette nécessité impérieuse de réinventer l'économie.
« Nous faisons partie de la génération qui a brûlé la chandelle par les deux bouts.(…) J’ai voulu prendre soin du vivant, de mes proches, et j’ai découvert l’éducation alternative. »
C’était un jeudi, vers la fin de l’hiver, j’avais enfourché mon vélo et parcouru le Sentier pour atterrir à la Climate House, le nouveau lieu dont tout le monde parle, le catalyseur d’idées à énergies renouvelables et régénératives. Maïka et ses beaux yeux bleus de Perse, nous attendaient un téléphone à la main et dans l’autre un pass pour la visite : 2000 m2, 8 étages, des bureaux à partager ou pas, un studio de podcast, des isoloirs pour les appels confidentiels, des salles de réunions, et surtout des événements animant la communauté de cette maison transmettrice de liens. Ancienne cadre de L’Oréal Luxe, l’ex-cadre au bureau a tout plaqué pour s’engager dans la transition écologique, guidée par une prise de conscience radicale : celle d’une mère face au monde qu’elle laisse à ses enfants. « J’ai monté une boîte aux États-Unis, j’ai bossé dans le luxe… nous faisons partie de la génération qui a brûlé la chandelle par les deux bouts. Et puis un jour, j’ai accouché. » Une phrase qui résume un basculement. Le 27 décembre 2012, l’année de la fin d’un monde pour les incas, la naissance de son fils Zéphir agit comme un séisme. « Le mammifère en moi est sorti. » Subitement, tout prend un autre sens. « J’ai voulu prendre soin du vivant, de mes proches, et j’ai découvert l’éducation alternative : Montessori, Freinet, la sociocratie… » La tête chercheuse explore l’ensemble des systèmes en rupture avec l’enseignement traditionnel, dans l’espoir de laisser à ses enfants non seulement une belle planète, mais aussi des outils pour y trouver leur place. Cette réflexion la mène à Florence, puis en France, dans un éco-campus en Bourgogne, Ulterïa, où elle travaille dans une fondation dont le principe d’actionnariat s’inspire du modèle de Patagonia. « J’ai découvert la philanthropie, la politique territoriale, et les tensions entre argent, pouvoir et impact. » Une expérience aussi intense qu’éprouvante. Les écrits de Pierre Rabhi, « il faut laisser des beaux enfants à la planète et une belle planète à nos enfants. » , va devenir un véritable leitmotiv pour la maman éveillée.
« On est une communauté apprenante, pas des experts. La richesse est dans l’intelligence collective. »
En 2024, elle rejoint la Climate House. Ce projet, porté par 80 actionnaires engagés, ambitionne de réinventer l’accompagnement des acteurs économiques vers une transition réelle. « On voulait un lieu où s’organiser, coopérer, accélérer la transformation de l’économie. » Pas un simple incubateur, mais un espace catalyseur, qui met en lien entrepreneurs, financiers, associations et industriels pour construire du concret. La Climate House repose sur trois piliers : transformation individuelle, organisationnelle et sectorielle. « On ne veut pas juste sensibiliser, mais accompagner un vrai passage à l’action. » La structure organise des « boost camps », des controverses et des groupes de travail sur des thématiques clés comme la finance durable. “On est une communauté apprenante, pas des experts. La richesse est dans l’intelligence collective.” Ici, la diversité est une priorité : 40 hommes, 40 femmes, et une pluralité de secteurs et de parcours. “On ne veut pas juste une start-up nation verte. On veut l’économie réelle, dans toute sa complexité.” Ce qui anime Maïka Nuti, c’est cette conviction que la coopération, et non la compétition, est la clé. Pablo Servigné soulignait qu’à l’école on nous incitait d’ores et déjà à la compétition, en nous interdisant de copier son voisin plaçant ainsi « la coopération comme une idéologie », voire une utopie. Cette philosophie basée sur l’entraide, Maïka l’applique au quotidien à la Climate House, mais aussi dans son parcours de mère et d’entrepreneuse. « Je crois à la biodiversité humaine. Retrouver notre juste place dans le vivant, c’est le défi de notre siècle. »
La Climate House n’a que trois mois d’existence, mais l’enthousiasme est palpable. « On avance, dans la joie et la bonne humeur. Ce n’est pas laborieux, c’est engageant. Parce qu’on le fait ensemble. Et c’est ça, la vraie transformation. »
Co-directrice générale de la Climate House.
Accélérons la transition pour une empreinte régénérative de l’économie.
80 entrepreneur.e.s. actionnaires
Mots : Ingrid Bauer
Photos: Alizée Bauer
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